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Depuis les années 1980, des objets matériels et immatériels d’une croissante diversité se trouvent qualifiés de “patrimoine”. L’idée d’un patrimoine numérique est ainsi aujourd’hui institutionnalisée. Pourtant, si l’on en croit l’expérience de la BnF au cours des vingt dernières années, l’acquisition d’une légitimité pour ces nouveaux objets patrimoniaux, qui vont des jeux vidéo sur support aux archives de l’Internet, des ouvrages anciens numérisés aux contenus dématérialisés collectés sur le web, a été une aventure mouvementée.Avec une période d’expérimentation, jusqu’en 2003, puis une période d’industrialisation et de professionnalisation, jusqu’en 2008, la filiation entre patrimoine écrit ou documentaire et patrimoine numérique a d’abord contribué à asseoir la place des documents et collections numériques dans les missions de la bibliothèque. Cependant, cette continuité restait indissociable d’une profonde altérité, inhérente à la nature du web et des objets documentaires qu’il génère. Ubiquité, volatilité, déstructuration, massification, internationalisation, transversalité : autant de caractéristiques du web qui ont contraint la BnF à adapter ses processus de travail, ses méthodes de traitement, ses outils et son organisation. L’étude de ce processus de patrimonialisation, qu’elle passe par l’observation des outils institutionnels qu’il mobilise, par l’étude des étapes ou gestes de ce processus, ou par les émotions qu’il suscite, fait apparaître deux aspects complémentaires du patrimoine numérique, interrogeant en profondeur l’identité et les missions de la BnF, dans son rapport à la société et au monde. D’une part, le numérique œuvre comme outil de dissémination, de médiation et de mise en valeur du patrimoine déjà existant ; d’autre part il voit émerger de nouveaux contenus et objets patrimoniaux. Dans la vision originelle d’une “très grande bibliothèque, d’un type entièrement nouveau”, la numérisation avait pour mission de réconcilier le patrimoine avec la nation, en utilisant la technologie comme outil de décloisonnement. Vingt ans d’expérimentations et de pratique ont semble-t-il fini par renverser cette logique, faisant du numérique un nouveau patrimoine dans lequel la nation est appelée à se reconnaître. "
Depuis les années 1980, des objets matériels et immatériels d’une croissante diversité se trouvent qualifiés de “patrimoine”. L’idée d’un patrimoine numérique est ainsi aujourd’hui instituti...
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